Inculpé par Ocampo, Laurent Gbagbo transféré hier à la CPI: L’ambiance à Korhogo avant son départ

by Le Magazine de la Diaspora Ivoirienne et des Ami(e)s de la Côte d’Ivoire | 30 novembre 2011 11 h 19 min

Les Korhogolais n’entendront certainement plus parler de l’ancien président Laurent Gbagbo. Le célèbre prisonnier a été exfiltré des lieux où il était en résidence surveillée depuis le mois d’avril dernier, pour la Cour pénale internationale (CPI), à La Haye. Les choses sont allées plus vite qu’on ne l’a imaginé. La décision de son inculpation lui a été notifiée hier mardi 29 novembre par le juge Luis Moreno-Ocampo par le biais de la Justice ivoirienne. Mais bien avant, il avait été signifié à l`ex-chef de l`Etat la veille, c’est-à-dire le lundi 28 novembre, l`acte de son inculpation pour crimes économiques par la Doyenne des Juges d`instruction, Cissé Makouéni Delphine. Tout cela avait déclenché une batterie de rumeurs qui s’était propagée, comme une traînée de poudre, à Korhogo avant le départ du prédécesseur du président Alassane Ouattara. Déjà le lundi vers 21 heures, nous avons remarqué la présence significative des Casques bleus de l`ONU devant une résidence non loin du bâtiment qui abritait l’ex-sûreté nationale de Korhogo. Au quartier 14, non loin du CHR, étaient également stationnés deux pick-up surmontés de mitrailleuses lourdes aux environs de 22 heures. Dès lors, nous comprenons que quelque chose se trame sous nos yeux. Le lendemain, soit le mardi 29 novembre, ayant appris que Laurent Gbagbo était encore au tribunal de première instance de Korhogo – il y était déjà le lundi 28 – , nous nous y sommes rendu vers à 8h 30, dans le but d’assister à l’audience. «On ne rentre pas ici, c’est interdit!», lâche un vieillard qui joue visiblement le rôle de vigile. En notre présence, une grosse cylindrée de type 4X4 de couleur grise aux vitres teintées s’engouffre dans le palais de justice, suivie aussitôt par un motocycliste qui ne savait certainement pas qu’il mettait les pieds sur un site hautement surveillé. Il est vite rappelé à l’ordre par le vieillard en question. «Revenez demain matin!», nous lance le vigile. Nous rebroussons chemin. Deux heures plus tard, nous revenons au palais de justice. Cette fois, trois militaires sont en faction. Nous restons sur place jusqu’à l’heure du déjeuner avant de décrocher, d’autant plus qu’une source d’information nous signale que l’ancien président n’était pas encore sur les lieux. A 15 heures, suite au coup de fil d’un informateur, nous revenons au tribunal. Le même dispositif est visible, sauf que les soldats qui étaient en faction depuis la matinée ont laissé la place à d’autres. A 17 heures, nous nous rapprochons du portail du tribunal, vu qu’une autre source d’information révèle le transfèrement de Gbagbo ce mardi même pour la CPI. Cette fois-ci, le refoulement des soldats est plus brutal. Armes au poing et nerveux, les militaires nous lancent: «dégagez d’ici!». Nous quittons les lieux pour nous immobiliser 20 mètres plus loin. Nous comprenons du coup que l’ancien président est sur place. Un informateur que nous appelons nous laisse entendre qu’un avion présidentiel s’est posé à l’aéroport de Korhogo et qu’il est déjà reparti avec Laurent Gbagbo à son bord. Le doute s’installe. Un doute amplifié par un avocat de Gbagbo qui se nomme Me Gougnon, que nous appelons. «Je ne suis plus à Korhogo. Appelez Me Dako », lâche le juriste. Ce que nous tentons de faire, en vain. Gbagbo est-il parti ou pas ? Difficile de le savoir.
La résidence présidentielle libérée
Pour en avoir le cœur net, nous nous rendons là où l`ancien chef de l`Etat ivoirien est censé être assigné à résidence, à 17h30. Comme par enchantement, il n’y a aucun dispositif sécuritaire. C’est à croire que les soldats qui sont toujours là depuis «l’incarcération» de Gbagbo se sont volatilisés. Nous comprenons que le l’ex-président ne reviendra plus dans cette résidence. Nous retournons, pour la énième fois, devant le tribunal. En désespoir de cause, nous appelons une source à l’aéroport de Korhogo. Sa réponse claque au téléphone comme un fouet : «C’est faux! Je suis sur place. Il y a un avion qui est là. Nous attendons le bruit de son moteur. Les militaires ont verrouillé les lieux. Impossible donc pour toi de venir ici. Gbagbo est encore là-bas. Reste sur place». Du tribunal, nous nous mettons devant le stade municipal en direction de l’aéroport. Le temps d`un demi-tour, nous apercevons un long cortège de véhicules venant dans notre direction. Il est 18h04mn. Composé de neuf véhicules (le 4X4 gris du matin, un autre du même modèle de couleur noire dans laquelle se trouvait Laurent Gbagbo, deux autres 4X4, une avec une plaque jaune, et un autre avec une plaque d’immatriculation normale, trois pick-up surmontés de mitrailleuses lourdes avec au moins 24 soldats avec des kalachnikovs et deux autres véhicules), le cortège s’ébranle en direction de l’aéroport de Korhogo. Les Korhogolais, peu habitués à voir un déploiement d’armement aussi important depuis la fin de la crise armée de 2002, assistaient, médusés, au passage du cortège qui s`ébranlait à très vive allure une fois aux abords du stade municipal du quartier 14, soulevant derrière lui un nuage de poussière. Notre source d’information nous contacte à nouveau une poignée de minutes après le passage en trombe du cortège, pour nous annoncer, au téléphone, que l’avion qui s’était posé plus tôt vient de décoller. Effectivement, au bout du fil, nous entendons le vrombissement des réacteurs de l`engin. Notre interlocuteur coupe le téléphone. Il est 18h 17. Laurent Gbagbo venait ainsi de quitter la ville qui l’a hébergé pendant sept mois. Direction La Haye, au Pays-Bas où, en compagnie de certains de ses proches, il sera jugé par la Cour Pénale Internationale. Comme l’ont souhaité les autorités ivoiriennes. Triste fin pour un chef d’État qui aura marqué la scène politique pendant une trentaine d’années. Ironie du sort, l’ancien président quitte Korhogo au moment où les Ivoiriens commémorent le premier anniversaire de la crise post-électorale, qui aura fait près de 3000 morts selon les chiffres divulgués par les Nations unies et confirmés par plusieurs organisations internationales des droits de l’Homme.

Y.DOUMBIA (Envoyé spécial à Korhogo)

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