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2011 en Afrique : leçons de la crise ivoirienne selon des observateurs

Par Raphaël MVOGO

YAOUNDE, 29 décembre (Xinhua) — Suite à un écho retentissant dans le reste de l’Afrique, la perspective de la tenue d’une multitude d’élections présidentielles prévues dans d’ autres pays du continent en 2011 donne déjà lieu pour les observateurs à tirer les leçons de la crise ivoirienne déclenchée après le second tour de la présidentielle du 28 novembre.

Vécue comme un rendez-vous manqué pour ramener la paix en Côte d’Ivoire, locomotive de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) dont elle représente 40% du produit intérieur brut (PIB), cette malheureuse expérience, pourtant soutenue par les Nations Unies, a ouvert des plaies qui font craindre un scénario similaire par exemple en Centrafrique, qui enverra ses électeurs aux urnes le 23 janvier avec une partie du territoire occupée par une rébellion, comme en Côte d’Ivoire.

« Vu d’Afrique centrale, il est évident qu’il y a dans la gestion de sortie de crise en Côte d’Ivoire au moins deux leçons qu’on peut tirer. La première leçon, c’est que l’élection ne peut plus apparaître aujourd’hui comme la seule modalité légitime de sortie de crise. Cela est donc aussi bien pour la Côte d’Ivoire que pour la Centrafrique. La deuxième leçon, c’est qu’ une commission électorale dite indépendante n’est pas une assurance d’une bonne maîtrise des élections », note à Xinhua le politologue camerounais Joseph Vincent Ntuda Ebodé.

Pour ce vice-doyen de la faculté des sciences politiques et juridiques de l’Université de Yaoundé II, « l’élection par principe n’étant rien d’autre qu’une une modalité de désignation des dirigeants, si ceux-ci ne sont pas prêts, ça ne vaut pas la peine d’engager les gens dans une voie sans issue. On a dit en Côte d’Ivoire que ça a duré longtemps que le président Gbagbo est au pouvoir sans élections. On les a quand même organisées dans les conditions totalement contestables et imparfaites, après 5 ans ».

Le résultat est connu : après huit ans de crise consécutive au coup d’Etat manqué du 19 septembre 2002 contre le régime de Laurent Gbgagbo, alors au pouvoir depuis seulement 18 mois, la Côte d’Ivoire, premier producteur de cacao avec 1,2 million de tonnes de fèves environ par an, a replongé dans la violence.

« Qu’est-ce que ça coûtait à la communauté internationale de faire son travail, c’est-à-dire réunir les conditions d’organisation objective d’une élection ? Elle ne l’a pas fait et elle a décidé que l’élection doit avoir lieu, comme si la seule organisation de l’élection était une garantie du retour à la paix », déplore le Pr. Ntuda Ebodé, par ailleurs chef du Centre de recherches d’études politiques et stratégiques de l’Université de Yaoundé II.

Une des conditions, rappelle le spécialiste de la science politique, était le désarmement des rebelles et des milices. « Dans aucun pays, on ne peut tolérer que les gens votent sous les armes, puisqu’il y a influence sur l’électeur. Mais, en Côte d’Ivoire, on l’a accepté. Pourquoi on l’a accepté ? Parce qu’on a fait une fixation sur la modalité de désignation du dirigeant, comme si les problèmes ivoiriens n’étaient que les problèmes de désignation d’un dirigeant ».

Pour un pays en crise, l’organisation d’une élection libre, transparente, crédible et dont les résultats sont acceptés de tous les protagonistes passe avant tout par la pacification de tout un peuple à l’intérieur du territoire, explique le politologue. Car, « l’élection vient comme pour couronner la paix civile retrouvée ; ce n’est pas l’élection qui va ramener la paix civile. Si les gens sont divisés avant l’élection, ils seront divisés après l’lection. Encore que la campagne même est organisée pour que les gens soient divisés ».

Une fois une paix acceptable créée et les réformes engagées là où les gens estiment qu’il y a des choses qui ne vont pas, l’élection aura pour finalité de choisir quelqu’un qui viendra appliquer ce minimum de consensus, c’est-à-dire l’entente autour de ces différentes réformes, appelées ailleurs lois de programmation.

« La plupart des élections en Afrique risquent de se transformer en conflits parce que dans la conception occidentale on a assimilé l’élection en Afrique à une modalité de gestion du conflit ou de sortie d’un conflit. Il y a des conflits en Afrique qui n’ont rien à voir avec l’élection. Par exemple, les conflits entre les éleveurs et les agriculteurs. Pour résoudre le problème qui oppose certains qui ont les champs à d’autres qui ont les bêtes qui mangent les herbes des premiers, faut-il faire une élection ? », s’interroge Ntuda Ebodé.

Le politologue insiste que « la communauté internationale ne peut pas avoir pour seul rôle de venir organiser les élections. Ce ne sont pas les élections qui opposent les gens. C’est des conflits portant sur différents types d’intérêts. Pourquoi ça a réussi en Afrique du Sud ? On a réglé les problèmes des Noirs et des Blancs avant l’élection de Mandela et les Mandela sont venus pour consolider ça ».

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